100 milliards pour bien défendre la Suisse ?

Le rapport « Renforcer la capacité de défense  – Montée en puissance : objectifs et stratégie » présenté par le chef de l’armée Thomas Süssli lors d’une conférence de presse le 17 août porte sur un total de 40 milliards de dépenses d’investissement à réaliser en 3 étapes.

À ce montant, et en reprenant la proportion donnée dans le rapport,  il faut encore ajouter  60 milliards de dépenses d’exploitation. Les 13 milliards de nouvelles dépenses militaires qui ont trouvé un large écho dans les média, ne représentent que le prix de la première étape des investissements, à réaliser d’ici 2031, pour «augmenter de manière substantielle la capacité de défense » de l’armée suisse pour « remplir sa mission » face à la nouvelle situation de menace de guerre russe contre l’Europe et la Suisse. La liste d’achats comprend entre autres une multitude de chars et véhicules blindés, des minidrones, des nouveaux systèmes de communication et informatique, des missiles sol-air de courte et moyenne portée. En plus que les armes conventionnelles et les nouvelles technologies, l’armée veut aussi « intensifier la coopération internationale », notamment  avec les armées de l’OTAN. 

Avec ce rapport l’armée montre concrètement comment elle entend réaliser les indications du Conseil fédéral contenues dans son « Rapport complémentaire au Rapport de politique de sécurité sur les conséquences de la guerre en Ukraine (RC RAPOLSEC 22)» présenté en septembre 2022 ainsi que la décision de la majorité de droite du parlement d’augmenter de 40% les budgets de l’armée jusqu’à atteindre 1% du PIB de la Suisse. 

Pour le Conseil fédéral et la majorité du Parlement, la priorité en matière de politique de sécurité est toujours et encore davantage la défense militaire et « il est dans l’intérêt de la Suisse d’axer plus résolument à l’avenir sa politique de sécurité et de défense sur la coopération avec des partenaires » (RC RAPLOSEC 22, chap. 5). Qui sont ces partenaires ? « L’OTAN va dans un proche avenir constituer la colonne vertébrale de la défense commune en Europe, dissuasion comprise » (ibidem). Mais pas question de « rouler gratis » avec l’OTAN : « Pour conclure des partenariats, il faut être capable de fournir des prestations substantielles  (…) En conséquence, la Suisse doit disposer des capacités de défense pour entretenir une capacité crédible à se défendre elle-même, mais aussi pour pouvoir fournir des contributions substantielles au profit des partenaires.» Voilà comment mettre d’accord les militaristes pro- et anti-OTAN. Et tant pis pour les moyens qui manqueront pour affronter les vraies et dramatiques menaces existentielles pour la population que constituent l’insécurité sociale et l’insécurité environnementale. 

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