Ce n’est pas un poisson d’avril : la commission donne un chèque en blanc au Conseil fédéral pour les exportations d’armes

La commission de sécurité du Conseil des Etats a approuvé aujourd’hui une proposition de modification de la loi sur le matériel de guerre qui va nettement plus loin que l’assouplissement proposé par le Conseil fédéral. Le projet de loi de la CPS-E est un passe-droit pour contourner les critères légaux et donc pour exporter des armes vers des pays impliqués dans des conflits militaires ou qui violent les droits humains. L’objectif de l’initiative correctrice, retirée il y a seulement quatre ans, serait ainsi définitivement vidé de sa substance. Le GSsA examine la possibilité d’un référendum.

La modification de la loi sur le matériel de guerre, qui a été traitée aujourd’hui par la CPS-E, servait déjà, dans la forme présentée par le Conseil fédéral, à créer une échappatoire pour les exportations d’armes. Le Conseil des Etats a aujourd’hui ouvert davantage cette faille. Ainsi, en lieu et place de la compétence d’exception prévue pour le Conseil fédéral, les critères d’exclusion pour les exportations de matériel de guerre vers les Etats de l’annexe 2 seront entièrement supprimés. « Le projet actuel équivaut à un chèque en blanc pour le Conseil fédéral afin de contourner les critères légaux pour les exportations d’armes. Cette soumission de la Commission au lobby de l’armement sape définitivement le contrôle démocratique sur nos exportations de matériel de guerre. », explique Roxane Steiger, secrétaire politique du GSsA.

Alors qu’il a toujours été question d’une modification « modérée » en ce qui concerne la compétence d’exception du Conseil fédéral, la décision prise aujourd’hui par la commission montre désormais clairement ce que vise le lobby de l’armement : un assouplissement drastique de la LFMG. Ainsi, les pays de l’annexe 2 sont purement et simplement exclus des dispositions relatives à l’exportation. Le Conseil fédéral peut adapter cette liste de pays de sa propre initiative par voie d’ordonnance. Aujourd’hui déjà, des pays comme la Hongrie, qui s’oppose aux sanctions de l’UE contre la Russie, figurent sur cette liste. « Il est très problématique que la Suisse continue à livrer du matériel de guerre, et ce même si une guerre civile éclate dans le pays de destination ou si les armes livrées sont utilisées contre la population civile. Cela ne rend certainement pas le monde plus sûr », critique Roxane Steiger.

« C’est précisément au vu des crises mondiales qu’il est choquant que la commission, par cette décision, place une fois de plus les intérêts économiques de l’industrie de l’armement au-dessus des valeurs humanitaires de la Suisse », commente Rayyân Rehouma, secrétaire politique du GSsA. De plus, le projet actuel n’apporte toujours rien à l’Ukraine. La justification de la CPS-E selon laquelle elle ne veut ainsi pas « abandonner » les pays de l’OTAN en cas de guerre remet en question la neutralité militaire de la Suisse et révèle les contradictions du mythe de la neutralité armée. Le GSsA condamne l’assouplissement de la loi sur le matériel de guerre par la présente modification de la loi et examine un référendum avec des partenaires de l’ancienne « Alliance contre les exportations d’armes vers les pays en guerre civile ».