Après le début de la guerre en Ukraine, la majorité parlementaire bourgeoise ne rate pas une occasion d’utiliser son pouvoir. Après l’acquisition anti-démocratique des F-35 et l’augmentation surdimensionnée du budget de l’armée, elle s’attaque de nouveau au service civil, et ce malgré le refus d’un durcissement il y a deux ans.
Jonas Heeb
Le Conseil fédéral se plaint depuis longtemps d’un manque d’effectifs qui menacerait l’armée et la protection civile. Nous y reviendrons plus bas. Pour le centre et la droite, le service civil serait au coeur du problème, car trop d’homme choisissent cette alternative. C’est pour cette raison que ces partis voulaient péjorer les conditions pour les civilistes, proposition que le parlement a heureusement rejetée. Lorsque les partis bourgeois ont remarqué qu’ils pouvaient instrumentaliser la guerre en Ukraine et se permettre tout ce qu’ils veulent dans la politique militaire, ils ont décidé de revenir à la charge au sujet du service civil. De son côté, la Commission de la politique de sécurité (CPS-CN) demande que le service civil et la protection civile soient rapidement fusionnés.
Des différences majeures
Dans son rapport sur l’alimentation de l’armée et de la protection civile, le Conseil fédéral prévoit lui aussi cette mesure dans l’une des deux révisions de la loi correspondante. Mais pour la CPS-CN, les choses ne peuvent pas aller assez vite. Comme pour le budget de l’armée, une décision précipitée et irréfléchie. La fusion de la protection civile et du service civil est problématique sous plusieurs aspects et plus complexe qu’il n’y paraît. Les deux organisations ont des structures et des logiques qui ne se laissent que difficilement combiner. La protection civile se prépare à des catastrophes, alors que le service civil participe au bien-être général de la société. Les deux services recrutent également des groupes cibles différents : les objecteurs de conscience rejoignent le service civil et les personnes inaptes la protection civile. Par ailleurs, le service civil est organisé au niveau national alors que la protection civile est gérée à l’échelon cantonal. C’est de là que vient le problème du manque d’effectifs pour la protection civile : certains cantons ont trop de recrues, d’autres pas assez. Il s’agit là d’un problème de répartition que l’organisation s’est créé elle-même et c’est maintenant le service civil qui en subit les conséquences, car des civilistes pourraient être forcés de participer à des opérations de protection civile.
Le mythe du problème d’effectifs
Le service civil n’est pas non plus une menace pour l’armée comme on le dit souvent. Les effectifs réglementaires de l’armée sont fixés à 100’000 personnes et ils se situent actuellement à 151’000. Certain.es disent que des modifications dans l’obligation de servir et les départs toujours plus nombreux vers le service civil mettraient en danger l’armée. Ce mythe circule depuis longtemps et il n’en devient pas plus vrai pour autant. Selon des calculs du magazine en ligne Republik de décembre 2022, en 2023, l’armée pourrait même atteindre une taille qui dépasse la limite fixée par la loi. Dans la publication de Republik, on apprend également qu’il n’est pas clair pourquoi le DDPS parle de sous-effectifs. Les chiffres sont stables, l’armée n’a pas de problème de sous-effectifs.