Il est temps de redéfinir les priorités

Presque 60 % de la population a dit oui à une 13è rente AVS le 3 mars dernier. Cette victoire claire et nette ranime un débat : pourquoi la Suisse devrait-elle dépenser de l’argent et pourquoi pas ?

En ce moment, on peut avoir l’impression que le mouvement antimilitariste est plutôt laissé de côté. Nos opposant·es aiment à prétendre que nous détruisons l’armée à force de lui faire faire des économies, que nous nous faisons des illusions lorsque nous demandons la signature par la Suisse du traité de démilitarisation le plus important de notre époque, le traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et que nous mettons ainsi en jeu la sécurité de notre pays. Nos adversaires insufflent la peur à la population en esquissant des scénarios d’horreur avec des chars russes au bord du Lac de Constance – et profitent ensuite de ces élucubrations : en Suisse aussi, le complexe militaro-industriel lance maintenant la course au surarmement, après avoir permis à Poutine d’attaquer l’Ukraine.

La réalité est toute autre. Des recherches ont montré que le nombre de personnes dans l’armée dépassait de 7’000 le nombre maximal admis. Par ailleurs, le DDPS lui-même exclut presque entièrement un conflit armé en Suisse. Et si l’on regarde les dépenses militaires par habitant·e, on voit rapidement que l’armée n’a pas été soumise à des économies forcées. La Suisse fait en effet partie des pays européens qui dépensent le plus pour leur armée. Ajoutons le coût d’opportunité de l’armée et la Suisse se retrouve même en deuxième place. Les discussions politiques sont donc bien loin de la réalité factuelle.

En Suisse, le peuple ne peut pas voter sur le budget du DDPS, il n’existe pas de référendum sur l’armement. Des chiffres de l’académie militaire de l’EPFZ montrent toutefois que 80 % de la population est contre l’augmentation du budget militaire. L’approbation claire de l’extension de l’AVS nous montre donc bien que la population ne veut pas combattre un ennemi imaginaire, mais les problèmes réels et concrets auxquels notre pays fait face. Au lieu d’agrandir l’armée chaque année, les politicien·nes devraient reconnaître une fois pour toutes que la vraie menace n’est pas Poutine aux frontières, mais le réchauffement effréné du climat, le fossé entre riches et pauvres qui se creuse de manière révoltante et l’explosion des coûts de la vie, des loyer et des primes d’assurance maladie. Les votations du mois de juin se rapprochent à grand pas et un OUI pour l’initiative d’allègement des primes montrera le chemin à suivre.