La vache sacrée cherche son halo

Trou financier, problèmes de liquidité ou ni l’un ni l’autre ? Quoi qu’il en soit, l’armée se rend ridicule. Et il n’est pas surprenant qu’aucune conséquence n’en résulte. Le GSsA demande une analyse de fond complète des événements et une analyse objective des menaces.

Fin janvier, l’armée annonçait qu’elle était forcée de renoncer à l’organisation de deux manifestations publiques (shows militaires), bien que ceux-ci soient déjà planifiés et budgétisés. Nous n’avons pas pu nous réjouir bien longtemps de cette décision certes sensée mais inattendue, car quelques jours plus tard, SRF dévoilait que 1,4 milliards de francs manquaient à l’armée pour payer les factures des prochaines années. L’armée s’est vue contrainte à l’organisation d’une conférence de presse à la suite de ces révélations. Lors de celle-ci, Thomas Süssli a confirmé maladroitement que l’armée souffrait de problèmes financiers qu’il a embellis en parlant de “problèmes de liquidité”. Il a ensuite critiqué les politicien·nes qui auraient agi de façon irréfléchie en décidant en décembre dernier vouloir augmenter d’ici 2035 et non pas 2030 le budget de l’armée pour que celui-ci atteigne 1 % du PIB. L’armée risquerait de ne plus pouvoir équiper ses troupes correctement avec des moyens si bas. Certain·es politicien·nes et représentant·es des médias ont demandé à raison si Süssli n’allait pas trop loin et s’il ne se comportait pas comme un 8ème Conseiller fédéral. Le chef de l’armée a même été critiqué par Ignazio Cassis devant toute la Société suisse des officiers, ce qui n’aura pas échappé aux médias.

Fais ce que tu veux

On ne peut que rester bouche bée devant ce qui a suivi ce chaos de communication. On a de plus en plus l’impression que l’armée peut faire ce qu’elle veut en ce moment. Des critiques exprimées par le GSsA et les partis de gauche n’ont quasiment aucun écho et les médias ne s’intéressent que moyennement à ces erreurs de l’armée. Dans le même temps, des décisions sur l’achat de nouvelles armes sont prises. En effet, quelques semaines après ce désastre de communication, le Conseil fédéral a accepté de nouvelles acquisitions. Et en mai, il est très probable que le parlement accepte le Message sur l’armée 2024, qui comprend encore plus de milliards pour l’achat d’armement. Une question se pose donc : cette représentation médiatique de l’armée comme institution à deux doigts de la faillite n’était-elle qu’une stratégie de la part de l’armée pour avoir plus de légitimité auprès des politicien·nes et de la population. Le GSsA demande que la lumière soit faite sur la situation avant de donner l’aval à quelque nouvelle dépense que ce soit. La Commission des finances a déjà fait cela en partie en se penchant sur le dossier. Verdict : du point de vue de la politique financière, tout est en ordre. La communication de Süssli, elle, aurait été plus que malheureuse. L’armée et son chef ressortent donc indemnes de cette affaire, tout comme la Présidente de la Confédération Viola Amherd (voir l’un de nos numéros précédents à ce propos). Ces derniers·ères savent que l’aval de la politique leur est assuré et qu’une panique hystérique peut servir de sonnette d’alarme à la politique. Il est en effet très probable que cet alarmisme fasse que les souhaits de l’armée soient exclus du frein à l’endettement et que les partis bourgeois continuent à les accepter sans broncher. Pour nous en tant que GSsA, il ne reste donc qu’à observer de très près ce que fait l’armée, à demander la démission de Süssli et à nous engager, comme déjà annoncé dans cette article, pour une analyse neutre et objective des menaces. 

ne rencontre plutôt rare s’est déroulée fin mars : Jonas Heeb, secrétaire du GSsA a pu croiser le fer avec Thomas Süssli lui-même dans le cadre d’une discussion politique organisée par des élèves bernois·es. Lorsque la discussion tournait autour de la paix, les propos du Chef de l’armée étaient remarquablement brefs. Il s’est toutefois bien sûr exprimé pour la paix, mais a préféré se concentrer sur son récit de l’état désolant de l’armée. Certainement voulait-il éviter que les élèves présent·es ne choisissent le service civil !