Le Conseil fédéral et le parlement ont lancé des attaques à répétition à l’encontre de la Loi sur le matériel de guerre au cours des derniers mois.
Ces modifications de loi auront des conséquences graves, sur le court et le long terme, car des autorisation de réexportation et des exportations directes d’armes vers des pays violant les droits humains sont à craindre. Un aspect que l’on oublie souvent : en modifiant cette loi, on permet à la Suisse de faire des affaires sur le dos des droits fondamentaux de la population dans les Etats vers lesquels ces armes sont exportées.
“Une minorité importante de la commission recommande de renoncer aux exportations et réexportations d’armes vers des pays impliqués dans des conflits ou des guerres.” Voilà l’une des recommandations du rapport de la commission d’étude de la politique de sécurité. Mettons clairement en évidence les implications écoeurantes de ce passage : une majorité de la commission pense que la Suisse devrait exporter du matériel de guerre vers des pays qui bafouent les droits fondamentaux de leurs citoyen·nes, ou l’accepte tout du moins. Selon ces “expert·es”, cela devrait valoir également pour les pays qui sont impliqués dans des conflits et des guerres.
Marionna Schlatter, conseillère nationale et membre de la commission, ajoutait lors d’une rencontre du groupe régional de Zurich que “la commission s’opposait ainsi diamétralement au droit en vigueur, un fait qui laisse bouche bée.”
Les commissions de politique de sécurité des deux chambres ainsi que le Conseil fédéral ont lancé deux attaques frontales contre l’ensemble de règles qui régissent les conditions d’exportation d’armes, de munitions, de véhicules et d’autres types de matériel. Le Conseil fédéral, lui, veut se donner le droit de déterminer les exceptions aux règles d’exportation. Moins de cinq ans après l’initiative correctrice, l’exécutif essaie donc de contourner une votation populaire sur ce sujet. Avec l’initiative parlementaire de la CPS-N, le Conseil national essaie par ailleurs d’autoriser les réexportations. En d’autres termes, cela signifie que des pays ayant acheté des armes en Suisse pourraient les réexporter à qui bon leur semble. Oliver Dürr, le patron de Rheinmetall Air Defense s’en réjouissait récemment dans une interview avec SRF. Il y disait explicitement que l’un de ses buts était de pouvoir vendre ses produits en Arabie saoudite. Le fait que ces armes pourraient être utilisées pour éliminer des ennemis du gouvernement saoudien ne semblait lui faire ni chaud ni froid.
Faisons un pas en arrière : même avec les règles actuelles, on ne sait pas où se trouvent exactement toutes les armes suisses. Des recherches de SRF ont révélé qu’une grande partie du matériel de guerre exporté vers l’Inde n’avait pas pu être contrôlé, par exemple. On ne peut par ailleurs pas exclure que ces armes se retrouvent entre de mauvaises mains.
Il paraît presque inconcevable de devoir dire cela, mais le matériel de guerre suisse ne devrait en aucun cas se retrouver entre les mains de dirigeant·es qui de fichent des droits humains. Elles ne devraient pas leur parvenir, ni directement, ni indirectement.